Designpack Gallery


Espace pour la promotion
de l'Art du Design Packaging
     
Designpack Gallery


Fabrice Peltier

Designer graphique de formation, Fabrice Peltier fonde l'agence P'REFERENCE - DYNAMISEUR DE MARQUE en 1985. Aujourd'hui, il s'agit de l'une des plus importantes agence indépendante de design packaging française, à qui l'on doit la création de plus de 10 000 produits de grande consommation.


Fabrice Peltier est aujourd'hui reconnu comme un « expert du design-packaging » qui ½uvre pour un design packaging responsable, plus respectueux de l'environnement. Il donne régulièrement des conférences, écrit dans de multiples journaux professionnels.
Il est le Directeur de la collection IdPack dédiée au design packaging, aux éditions Pyramyd et auteur des ouvrages : L'Eau, source d'innovations, La Boîte, solution d'avenir, Éco-design, chemins vertueux, Art, échanges créatifs et Série limitée, objet de collection.
Il participe à la création l'INDP (Institut National du Design Packaging) en 2003, dont il est le Président.
Il fonde la DESIGNPACK GALLERY en 2008, le premier espace grand public (librairie, boutique, exposition et salle de conférence) entièrement dédié au design-packaging. Enfin, Fabrice Peltier, est expert Design Packaging auprès de l'ONUDI (Organisation des Nations Unies pour le Développement Industriel).


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Fabrice Peltier

Interview

Fabrice Peltier, le poète de l'emballage

Créateur de plus de 10 000 produits de grande consommation, Fabrice Peltier est reconnu comme un expert du design-packaging et un fervent défenseur de l’éco-design. Fondateur de la Designpack Gallery à Paris, il change notre regard sur les emballages avec pragmatisme et humour. Un travail à découvrir à travers trois expositions enthousiasmantes.

Découvrez ci-dessous l’interview de ce défenseur de l’éco-packaging.



Néoplanète : Comment l'idée de dédier un endroit aux emballages a-t-elle germé dans votre tête ?

Fabrice Peltier :
Je faisais déjà partie d’une association de défense de l’environnement en Lozère : je nettoyais des dépôts d’ordures sauvages pour rendre la nature un peu plus propre. Sa protection est un problème d’éducation, et non économique. D’ailleurs, je m’oppose au principe du pollueur payeur et même à celui de la compensation carbone. Les designers sont responsables de ce qu’ils créent et de l’empreinte écologique des produits. J’ai très souvent éprouvé de la culpabilité à voir les emballages que j’avais réalisés dans les caniveaux. Je me suis engagé à une époque où on ne débattait pas autant de toutes ces questions. Aujourd’hui, on en parle, et c’est tant mieux ! L’exposition L’Arche du recyclé présente, par exemple, des animaux 100 % recyclés et 100 % recyclables. Il s’agit de toute une faune terrestre et marine conçue à partir de déchets d’emballages métalliques, de canettes, de sacs plastiques que nous jetons.

Vous avez aussi conçu L'Allée du recyclage que l'on peut admirer dans le métro (station de métro Palais-Royal – Musée du Louvre). Quel honneur pour les déchets !

F. P. :Si le 1er arrondissement de Paris est celui qui compte le moins d’habitants, il est celui qui produit le plus de déchets car c’est un quartier très touristique. Mes expositions sont dénuées de tout propos culpabilisant ou bien répressif. Il faut cesser de montrer des dauphins sur la plage ou des ours en train de se noyer dans la mer. Oui, ça existe, mais comment voulez-vous que cela sensibilise le Parisien à trier et à recycler ? Je veux le toucher grâce au côté émotionnel de l’objet. C’est le message de cette Allée du recyclage. C’est une galerie d’art et d’artisanat pour expliquer le tri, le recyclage… de façon didactique, ludique et positive, car tant qu’on parlera négativement des détritus, et qu’on les mélangera aux crottes de chien, ça n’ira pas. Je veux rendre le geste de jeter beaucoup plus fun.

Vous avez transformé l'observatoire du BHV en un jardin surprenant avec, en son centre, un arbre géant constitué de 6 200 bouteilles en plastique. Décrivez-nous ce jardin recyclé idéal...

F. P. :C’est un jardin qui conserve le carbone. Ceux qui travaillent dans le secteur du recyclage mettent souvent en exergue la célèbre citation de Lavoisier : « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. » Cela ne veut pas toujours dire qu’il faut revenir à la case départ.
D’un emballage que l’on détruit, on n’en fait pas forcément de la matière première. Je prône une solution de recyclage qui est une réponse d’avenir : se servir de sa matière première pour fabriquer d’autres objets, en imaginant des nouveaux cycles de vie. Par exemple, les fleurs en PET (polyéthylène téréphtalate) que l’on peut admirer dans Le Jardin recyclé du BHV ont été réalisées par des membres de l’association Camino, près de Nîmes. Ils ont découpé le bas des bouteilles en forme de fleurs et, moi, j’ai modifié le haut. Rien ne se perd, tout se transforme : avec une bouteille en PET, j’en obtiens deux. Les poules et les fleurs conçues avec des canettes, elles, ont été créées par des associations de réinsertion en Afrique du Sud. Ces dernières récupèrent les sacs en plastique pour qu’ils arrêtent de voler dans la nature. Enfin, les jolies fleurs métalliques viennent des Philippines. Certes, on doit les acheminer, mais c’est le savoir-faire local qui m’intéresse. Si on peut « switcher » avec de l’emballage ce que produisent ces artisans, on pourra changer de matériau. En Afrique du Sud, on trouvait déjà des poules en tissu et, aux Philippines, nombre d’objets en métal, mais pas à base d’emballages.
Cela m’a permis de créer une sorte de retour à l’envoyeur. En tout cas, d’en mettre moins dans la mer ou ailleurs.

Interview réalisée par Émilie Villeneuve , Néoplanète, Avril 2011


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Interview

Le design packaging « responsable », une chance pour la profession, une chance pour les entreprises

L’heure n’est plus à la critique généralisée de l’emballage, cible facile parce que pollution visible, mais bien au développement d’une approche « responsable » du design packaging. Reste aux entreprises à faire preuve de responsabilité pour ne pas tomber dans le greenwashing…
L’éco-packaging n’est cependant qu’une étape de la révolution en cours : c’est un véritable changement de modèle qui est aujourd’hui nécessaire pour sauver la planète ; il faut repenser les systèmes de transport, de distribution, la consommation, etc., créer des objets en pensant aux différents usages qu’ils pourront avoir et leur donner ainsi plusieurs vies. Cela ouvre de belles opportunités aux designers, en France, mais aussi dans les pays émergents, où la conscience environnementale est parfois aussi développée qu’en Occident. L’innovation est la clef… ou l’innovation, c’est du design.

Accomex : Doit-on parler de design packaging « responsable » ou d’éco-packaging ?

Fabrice Peltier :
Tout le monde a oublié à quoi servait l’emballage… Or, à la base, l’emballage sert à protéger ce qu’il contient : c’est un contenant qui protège un contenu. Deux éléments méritent d’être rappelés : - Le premier est purement physique : s’il protège ce qu’il contient, l’emballage évite les gaspillages. Qu’est-ce qui est le plus responsable : gaspiller des produits alimentaires ou, éventuellement, gaspiller du matériau d’emballage ?... Le packaging a sauvé des milliards de vie ; c’est en cela qu’il est totalement responsable. Il y a des chiffres qui ne trompent pas : plus l’emballage est développé dans un pays, moins il y a de pertes ; c’est inversement proportionnel… et c’est ce qui justifie la présence d’un expert packaging à l’ONU. - Le second est l’utilité du packaging trop souvent oubliée dans les pays occidentaux : le commerce. Sans emballage, pas de commerce… L’emballage a permis et permet encore de développer les échanges Est-Ouest, Nord-Sud, de denrées alimentaires. Se dire qu’il n’existe pas de packaging responsable, c’est une approche de « bobo »… ! Il se trouve que le packaging a un défaut majeur : il est visible, dans le caniveau, dans les champs, etc. C’est une pollution visuelle. Mais la question ne porte pas sur la responsabilité ou l’irresponsabilité du packaging ; il s’agit d’une question « d’éco-responsabilité » globale dans le cycle de consommation, cycle dont le packaging n’est qu’un élément.

Ne peut-on dire quand même qu’il y a parfois du « sur-packaging » ?

F. P. : Oui et Non ! Tous les pays développés sont en état de surconsommation. Ce n’est pas un problème de « sur-packaging », mais de surconsommation : l’Europe consomme aujourd’hui trois fois ce que la terre est capable de produire ; les États-Unis cinq fois… Si les Chinois se mettent juste à produire autant que l’Europe, la planète ne pourra pas suivre… Il faut donc revoir nos modèles : quand il y aura moins de consommation, il y aura aussi moins d’emballage. Mais ce n’est pas en réglant le problème de l’emballage que l’on règlera le problème de la planète ! L’emballage n’est que le symbole, visible, de notre surconsommation… D’ailleurs, cette notion de sur-packaging est une vision d’américains, de français : à l’échelle mondiale, on manque d’emballage… en Afrique, au Moyen-Orient, en Chine, etc. Savez-vous qui est le premier consommateur de denrées alimentaires dans les pays sous-développés quand il n’y a pas assez de packaging ? C’est la poubelle! Ces pays ont besoin de boites de conserves, de bouteilles d’eau ; c’est vital pour eux, alors arrêtons de stigmatiser l’emballage !

Même dans les pays occidentaux vous pensez qu’il y a stigmatisation ?

F. P. : Bien sûr ! En France, par exemple, en 1993, quand a été lancé le tri sélectif, il y avait 4,6 millions de tonnes de déchets d’emballage ménagers. En 2006 (derniers chiffres en ma possession), la production de déchets d’emballage ménagers était de 4,4 millions de tonnes ; pour la première fois, elle avait baissé… Ce n’est pas seulement lié à une prise de conscience des individus, mais à l’introduction de la Directive européenne de 1994 imposant aux industriels de réduire l’emballage « à la source » (une canette est aujourd’hui 75 % moins lourde qu’au début des années 1990 ; un gain de matière qui correspond aussi à un gain financier pour l’industriel…). L’emballage a déjà fait sa cure d’amaigrissement et peut encore espérer quelques gains. Le problème n’est donc pas là… Ce n’est même pas un problème de suremballage au sens où vous l’entendez d’une boite trop grande pour un petit contenu, d’un emballage carton autour du tube de dentifrice, etc. Le problème de l’emballage, c’est son transport et ses flux logistiques : si votre emballage est constitué de deux matériaux différents, deux camions vont apporter de la matière ; s’il en contient trois, trois camions vont circuler, etc. Rappelons que 25 % des émissions de CO2 sur la planète sont liés au transport… Donc le problème de l’emballage est d’abord un problème de transport : on transporte trop d’emballages vides, de l’usine où on les produit, à l’usine où on les utilise. Au 19ème siècle, l’industrie de l’emballage s’était installée à côté des sites de production. Aujourd’hui, on a délocalisé, parce qu’il est devenu moins cher d’acheter son emballage à 4 000 kms de l’usine, par exemple, que de l’acheter juste à côté. L’éclatement d’un tissu industriel homogène a conduit à une multiplication des transports. Et je ne vous parle même pas du choix de certaines entreprises de transporter des produits pasteurisés dans des camions frigorifiques pour faire croire que ce sont des produits frais…

On se donne donc bonne conscience quand on « attaque » le packaging ?

F. P. : Oui, c’est le client facile, visible… alors que le problème est bien plus large, qu’il est lié au cycle de vie des produits. C’est une nouvelle révolution industrielle qui s’impose, car notre système industriel est devenu complètement obsolète… Un packaging responsable aujourd’hui, c’est un packaging qui se pose la question de son bilan environnemental global et qui va chercher à l’améliorer. L’éco-responsabilité elle est là : il n’y a pas de solution unique mais un processus d’amélioration continu.

L’éco-packaging s’adresse-t-il à tous les secteurs d’activité, à toutes les entreprises ?

F. P. : Oui ! L’emballage est la 7ème industrie mondiale, juste après l’aéronautique… Tout est emballé, même la carlingue d’Airbus d’ailleurs, morceaux par morceaux, pour être envoyée sur le lieu de son assemblage ! Plus sérieusement, lorsque l’on se présente devant quelqu’un, on n’a qu’une seule chance de faire bonne impression. Et l’emballage a pour devoir, systématiquement, de donner la bonne impression. C’est pour cela qu’il faut aider les pays en développement à disposer de packaging leur permettant de mieux vendre leurs produits en Occident ; qu’il y ait le terme « éco » ou pas d’ailleurs ! À mon sens, l’« éco » est désormais inclus, c’est le « minimum syndical » dans la réalisation de tout emballage… Il faut juste se méfier de ceux qui en parlent trop, qui s’affichent trop « éco ». L’éco-communication est un bon argument de vente, mais plus on affirme, plus on doit être en mesure de démontrer… Cela engage la responsabilité de l’entreprise. Or aujourd’hui, il y a beaucoup de « greenwashing ». Je dis et répète quelque chose de très politiquement incorrect : la mise en place du tri sélectif et du recyclage ne doivent pas avoir été inventés pour nous donner bonne conscience de jeter ! Oui, Éco-Emballages a permis de réaliser des progrès. Mais encore une fois, il faut aller plus loin : une révolution se prépare, un changement de modèle. En tant que designer, je n’ai jamais vécu dans mon temps, je suis dans l’anticipation. Mais aujourd’hui, je me sens moins Don Quichotte qu’il y a dix ans ! C’est bon signe, les messages passent, les entreprises changent. Je suis plus optimiste qu’il y a cinq ans.

Peut-on parler d’un « avantage comparatif » des designers français sur le marché international du packaging ?

F. P. : La France du design est bien positionnée à l’international d’une façon générale. Par contre, je n’ai pas tant de concurrents que cela en France ou en Europe sur la problématique de l’éco-packaging. Se positionner sur une telle problématique nécessite d’avoir du courage, le courage de dire non à certaines propositions d’entreprises pour ne pas cautionner le « « greenwashing ». On se fait forcément des ennemis ! Je suis également considéré comme le Président le plus « vert » qu’ait jamais eu la Pan European Brand Design Association (PDA)… et j’en profite pour lui donner une certaine orientation. Notez que de plus en plus de designers sont ouverts aux questions de développement durable. C’est un moyen de faire sortir le design du marasme dans lequel il est.

De quel marasme parlez-vous ? Le design packaging ne va pas bien ?

F. P. : Ce métier s’est laissé enfermer dans la commande… À trop travailler à la commande pour de grandes marques, les designers packaging ont plus vendu de la maquette, de la production, que des idées. Comme aujourd’hui, grâce aux technologies de communication, la production peut se faire à l’autre bout du monde sans délais de livraison supplémentaires et à moindre coût, la profession s’est paupérisée. Désormais, la valeur ajoutée de la profession est là, dans l’éco-packaging. En fait, il faut tout réinventer… Quand vous regarder les emballages d’aujourd’hui, 80 % a été inventé entre 1860 et 1950. Or, que reste-t-il aujourd’hui dans nos poches, dans nos vies, de ces années-là ? Même les maisons, « on » nous dit qu’il faut les démolir pour qu’elles soient HQE. L’« éco », c’est encore une fois le « minimum syndical », les bases fondatrices de ce que l’on doit réinventer. Tous les experts du monde peuvent prendre le problème par tous les côtés, tous arriveront à une même conclusion : on ne peut continuer comme cela ; il faut réinventer un modèle, un modèle basé sur l’énergie et les ressources disponibles aujourd’hui. C’est une très bonne nouvelle pour les designers… repenser un modèle, c’est le propre de la créativité.

Vous avez des idées quant à ce « nouveau » modèle n’est-ce pas ?

F. P. : Bien sûr ! Si l’on reprend la maxime de Lavoisier : « rien ne se perd, rien ne crée, tout se transforme », il y a deux manières de l’interpréter : soit revenir à la case départ, c’est-à-dire transformer ce qui a été créé en matières premières (= recycler la matière). Mais cela a un coût tant environnemental que financier ; soit revenir à la phase de création, et créer quelque chose en imaginant en même temps sa transformation future. C’est là qu’il y a tout à inventer. Pour vous donner un exemple, si vous prenez Tetra Brik, c’est du papier, à 70 %, de l’aluminium et du plastique. Très bien, c’est donc recyclable. Mais c’est aussi un matériau étanche, un peu rigide, assez solide, etc., à qui l’on pourrait trouver d’autres utilisations que son utilisation première. Autrement dit, il s’agit, lorsque l’on crée le produit en question, de penser aux différents usages qu’il pourra avoir et de prolonger ainsi son cycle de vie. Il faut créer des objets en réfléchissant aux transformations possibles de l’objet, lui donner plusieurs vies. La révolution, elle est là.

Comment réagissent les entreprises qui viennent vous voir ? Sont-elles prêtes ?

F. P. : Elles n’ont pas le choix ! Il y a 25 ans et pendant dix ans, on réfléchissait à horizon de six ans, puis à trois ans, puis on a réfléchit à un an, à six mois, puis on a arrêté de réfléchir… Aujourd’hui, c’est fini. Il est temps d’expliquer aux entreprises que leur problème n’est pas seulement un problème de packaging, c’est un problème plus global : il faut réinventer les systèmes de distribution, réinventer les systèmes de remplissage, de consommation. Il faut réfléchir à l’ensemble. C’est un changement radical. Qui peut dire aujourd’hui qu’une marque a une durée de vie éternelle ? Qu’est-ce qui nourrit une marque ? Ce n’est pas la communication, c’est l’innovation, l’offre produits ! Apple a failli mourir, il dépasse désormais Microsoft. Les trois quarts des industriels de cette planète ont oublié que ce qui nourrissait leurs entreprises, c’était l’innovation et l’offre produits, pas la publicité. Il faut donc revenir dans l’innovation absolue. Et l’innovation, c’est du design, du design et de l’intelligence…

Vous tenez ce même discours à une entreprise chinoise, libanaise ou française ?

F. P. : Oui, mais je n’ai pas la même écoute ! L’Asie va plus vite qu’on ne l’imagine, les Chinois, comme les Coréens. En fait, la culture asiatique est basée sur la copie du maître, mais avec un postulat : le but du maître est que son élève le dépasse. Alors qu’en France, nous sommes corporatistes. Il faut que les entreprises françaises réagissent. Curieusement, je suis beaucoup plus serein pour la planète en général, pour le monde, que je ne le suis pour mon pays… Cela dit, c’est très « franchouillard » comme attitude.


Interview réalisée par Sandrine Rol , Accomex, le 15 Novembre 2010


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Fabrice Peltier

Portrait

Fabrice Peltier, le militant de l'éco-emballage.


Designer en packaging, journaliste, auteur, expert auprès de l'ONUDI et galeriste, Fabrice Peltier prône un emballage éco-responsable.
En vingt-cinq ans de carrière, le fondateur de l’agence de design packaging P'Référence aura créé plus de 10 000 produits. « Imaginez la montagne de déchets à laquelle j’ai participé ! », lance Fabrice Peltier, sans concession. Le designer graphique n’est pas du genre à fuir ses responsabilités. Depuis la fin des années 90, il s’investit dans le développement de l’éco-emballage, écrit des articles et des ouvrages sur la question, et donne régulièrement des conférences. Choisi comme expert par l'ONUDI (Organisation des Nations Unies pour le Développement Industriel), il est chargé de prodiguer ses conseils aux populations des pays en voie de développement. « La fonction de l’emballage, avant d’être marketing, est de protéger le contenu et de ne pas gaspiller les denrées alimentaires.


Il ne faut pas oublier que l’emballage a permis d’éradiquer le scorbut ! Il permet aussi de développer la libre circulation des marchandises », défend cet adepte du développement durable. Il poursuit, entre colère et défi : « Critiquer les emballages est un luxe de pays riche. Une bouteille d’eau en plastique n’a peut-être pas de sens à Paris, mais elle en a un en Afrique ! Certes, il y a un problème de suremballage dans certains pays développés. Mais les emballages peuvent aujourd’hui être recyclables à 100 %. Just do it ! En revanche, à l’échelle mondiale, il manque d’emballages. Tout est une question d’éducation et de moyens. »
Celui qui, enfant, passait ses week-ends à ramasser les ordures jetées au bord des routes de Lozère, continue sur sa lancée. Sa dernière initiative en date : l’ouverture de la Designpack Gallery, en 2008. « Le secteur de l’emballage a beau être la septième industrie mondiale, il n’existait pas de lieu d’information dédié à ce sujet », explique-t-il. Cet espace grand public qui abrite une librairie, une boutique, une galerie et une salle de conférence, se trouve au cœur de Paris, à deux pas des Musées du Louvre et des Arts Décoratifs. « Dans les départements des antiquités étrusques et gréco-romaines, on se pâme devant une multitude de contenants. Dans mille ans, on fera la même chose avec nos packagings », ironise-t-il. Tous les deux mois, le galeriste met en place une nouvelle exposition en suivant un fil rouge (ou vert ?) : le packaging dans le respect de l’environnement. Après avoir convié divers artistes et artisans, Fabrice Peltier met en scène ses propres créations. Récemment, il a réalisé à partir d’emballages Tetra Pak des oeuvres en hommage à des artistes contemporains (Mondrian, César, Arman…). Jusqu’au 27 novembre, il transforme des palettes en meubles et objets, et en décembre, il proposera des sapins, des décorations et des cadeaux de Noël entièrement réalisés avec des emballages recyclés. Il espère ainsi remplir son objectif : afficher un bilan carbone neutre à la fin de sa vie.


Violaine Brissart, Reyclage Recupération N°42, le 6 décembre 2010


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Interview

« Intégrer l'éco-design dans la conception de l'emballage »



Pour que l'emballage joue pleinement son rôle d'interface entre les marques et les consommateurs, les « éco-designers » devraient davantage être interpellés et écoutés. Telle est, en substance, la signification des propos de Fabrice Peltier.

Revue Laitière Française : Les designers et autres « apporteurs d'idées » en matière d'emballage ont-ils un rôle à jouer dans les démarches de respect environnemental ?

Fabrice Peltier : Oui, bien sûr et plus que jamais. Mais, cette fois, il s'agit d'aller plus loin que la seule mise en place de solutions techniques d'allégement, de recyclabilité ou de biodégradabité. Pour certains emballages, comme les bouteilles en plastique, l'allégement arrive d'ailleurs à sa limite. Aujourd'hui, il s'agit de s'ouvrir davantage à des démarches dans lesquelles le consommateur serait totalement impliqué et responsabilisé et ne risquerait pas de prendre en grippe les emballages et leurs déchets. Comme on le constate encore trop souvent aujourd'hui !

Comment voyez-vous cette nouvelle approche?

F. P. : Pour toute nouvelle conception, nous devrions pratiquer systématiquement l'éco-design. Pour apporter des solutions qui facilitent et dédramatisent le geste Fatal de jeter les emballages, mais aussi pour encore mieux adapter les emballages aux modes et lieux de distribution et aux façons de consommer des années à venir. Les marques ont compris que les modèles ont changé, mais seules (ou presque !) les plus importantes se sont donné les moyens d'avancer. Or il est grand temps de réinventer l'emballage. Dans le secteur laitier, nous travaillons, depuis près de cinq ans, avec les plus grands groupes, à tout remettre à plat. II faudra très probablement le même nombre d'années pour que les projets aboutissent car les concepts seront « révolutionnaires ». Notons toutefois que le fait de retirer les suremballages en carton des yaourts ou les boîtes en carton ou bois des pâtes molles est déjà un grand pas vers cette mutation.

Emballage 2010 a réalisé une étude, auprès des industriels, sur leur perception du packaging en termes de design. Que pensez-vous des conclusions?

F. P. : J'ai été très surpris du décalage de perception entre les marques et les consommateurs. Ce qu'attendent, en priorité, les consommateurs, ce sont des revendications basiques et essentielles que les industriels devraient tous retenir comme priorités. Or c'est loin d'être le cas. Les consommateurs veulent que les emballages protègent les produits. Ce qui, avouons-le, est le minimum syndical ! Or, seules 48 % des marques en font une priorité. Ils veulent que ce soit des supports d'information, or seules 35 % des marques accèdent à leurs attentes. Ils veulent aussi pouvoir utiliser les emballages en toute sécurité et en récupérant le maximum de produit contenu. Ce que les marques ne perçoivent pas comme une priorité. Les consommateurs se disent aussi attachés à la recyclabilité et à l'impact environnemental. Les marques y sont certes de plus en plus sensibles, mais elles ne sont que 24 % à les citer comme prioritaires. On s'aperçoit donc que les critères les plus importants pour les marques ne sont pas tournés vers l'intérêt des consommateurs, puisqu'il s'agit essentiellement pour elles de « promouvoir les ventes » et
d'« améliorer le transport et le stockage ». Ce qui va a l'inverse de la définition propre au « design packaging ». Contrairement aux conclusions bienveillantes de l'étude vis à vis du design, il ne m'apparaît donc pas qu'une majorité de marques soient véritablement prêtes à investir dans une réflexion design pour concevoir leurs emballages.


Sabine Carantino , la Revue Laitière Française, Novembre 2010


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Plus belle la boîte

L’emballage : une méprisable ordure ? Fabrice Peltier, designer en packaging, réhabilite la boîte et accuse les populations occidentales d’irresponsabilité. Rencontre avec un esprit libre, militant chevronné pour le développement durable.



Tous les matins, il ramasse les déchets d’emballages qui ponctuent sa route. Fabrice Peltier en fera des œuvres d’art et les remettra en circulation. Ces boîtes en métal, canettes rouillées et rabougries d’Orangina, de Pulco, il les a lui-même dessinées.

En 1985, celui qui s'est baptisé le "designer de l’ordure" fondait l’agence P’Référence, l'une des premières spécialisées dans le design packaging. « Je sortais d’Estienne, une école de design et graphisme. Un packaging est la première chose qu’on m’a demandé de faire. Je ne savais pas ce que ce terme voulait dire. Puis je n’ai plus arrêté d’en faire. » Tombé par hasard dans l’emballage, il crée tout de suite sa propre boîte, parce qu'il ne se voyait pas « travailler pour quelqu’un d’autre ». Il n’a alors pas 22 ans.

Il ne s’y voyait pas mais se pique rapidement de packaging. « L’emballage est passionnant parce qu’il est culturel. Entre l’art et lui, il y a énormément d’échanges créatifs depuis le 19ème siècle. C’est aussi un moyen de comprendre la société. Il suffit de regarder un emballage pour constater que les familles se déchirent, qu’elles mangent moins à la maison mais davantage à l’extérieur… »
Membre d’associations écolo avant l’heure, le garçonnet ramasse chaque week-end les déchets d’emballage qui peuplent son village, en Lozère. En 1970, 9 ans au compteur, le jeune Peltier remporte un concours de dessin organisé par l’Unesco, dans le cadre d’une résolution érigeant l’éducation comme valeur principale pour préserver l’environnement. Le packaging, un hasard ? L’inconscient a de beaux jours devant lui...

Très vite, l’entreprise cartonne et P’Référence devient une incontournable dans le domaine. A l’époque, se sent-il fautif d’être le père de déchets d’emballages, ennemis jetables de la planète ? Contrarié, Fabrice Peltier hausse le ton. « Je n’ai pas à me sentir plus coupable que les autres. Tous les jours, je prends n’importe qui la main dans le sac. » C’est pourtant bien lui l’auteur des ignobles boîtes qui, par leur unique présence, abîment tous les paysages ! « Il faut relativiser avec l’emballage. Ces déchets sont recyclables à l’infini. Si vous les mettez dans le bon circuit, ce ne sont plus des déchets dangereux. Une fois dans son bac de tri, la boîte n’est pas un problème. » Reste au (sur)consommateur de savoir prendre ses responsabilités !
Il poursuit, entre véhémence et pédagogie : « Il faut avoir le cul dans du coton à Paris, où l’eau coule à flots, pour critiquer l’emballage ! Pourquoi Napoléon a-t-il fait inventer la conserve ? Pour que ces grognards n’aient pas le scorbut. Il ne faut pas oublier une chose : si aujourd’hui, il y a moins d’intoxications alimentaires, moins de pertes alimentaires, si aujourd’hui je suis expert auprès de l’ONU, c’est parce que l’emballage sauve bien plus de vie qu’il n’en tue. »

On l’aura compris, le designer ne veut pas supporter à la place des autres les dégâts de leur paresse. Ceux qu'il montre du doigt : les populations occidentales. « L’emballage est un problème de pays riches », assène-t-il.
La seule valeur en laquelle croit le designer en matière de protection de la planète, c'est l’éducation. Pour preuve, sa fonction d’expert auprès de l’ONUDI, l'Organisation des Nations Unies pour le développement industriel. Il court le monde, à la rencontre des populations des pays en voie de développement où il prodigue de précieux conseils. « Là-bas, ils manquent d’emballage. Nous en avons trop, eux, pas assez. C'est la raison pour laquelle le choléra sévit en Haïti. »
Le spécialiste ne fait pas la leçon et aborde ces populations sans jamais agiter devant eux le spectre de nos propres erreurs. « Ils ont largement le droit de commercer, le droit à la vie, à la consommation. Si on ne leur donne pas d’emballage, comment pourront-ils échanger entre eux et exporter. Il n’y a pas que nous qui avons le droit de leur envoyer nos merdes. » Dans ces pays « à mouches », comme il les appelle, il refuse de boire l’eau courante et déplore l’absence des bouteilles bénies.

L’ONUDI s’est intéressée à Fabrice Peltier car, depuis des années, il s’illustre en tant que militant inconditionnel pour le développement durable. En début d’entretien, il s’emportait lorsqu’était évoquée la question de sa responsabilité quant à la prolifération de l’emballage. Parce qu’en fait, loin d’être coupable, il est au contraire le messager de la première heure d’un comportement responsable ! « Jusqu’au début des années 90, je ne me rendais pas compte que l’emballage était un déchet. En 1994, l’Union Européenne adopte une directive concernant le tri des déchets et j’ai eu un déclic. À la fin des années 90, j’écris mes premiers articles vis-à-vis des designers. Mon discours : "responsables, bientôt coupables"». Fabrice Peltier estime alors que les créateurs d’emballages devaient également prendre leurs responsabilités. « J’organisais des conférences. On était dix dans la salle à s'auto congratuler. Mais les autres me prenaient pour un fou. Ils me tapaient dans le dos en disant "c’est bien" mais ils s’en foutaient complètement. »

Il s’est agité durant de longues années avant que son discours ne soit entendu et compris. Il s’est battu à coup de conférences, d’articles et même de livres. Si l’obstiné a obtenu gain de cause, il ne se repose pas sur ses lauriers. En 2008, Fabrice Peltier ose un nouveau pari. Une fois de plus, il passe pour un illuminé. Le bagarreur ouvre les portes de la Designpack Gallery, un endroit où est faite la promotion de l’art du design packaging. La boutique du "musée" vend pochettes tressées en sacs plastiques, patères en bouteilles plastiques et autres sacs en anneaux d’ouvertures de canettes métalliques. Place au grand détournement !
« Avec ce lieu, je prouve qu’il y a plusieurs alternatives. Quand on s’est jeté, bille en tête, dans le recyclage, en 1993, je pensais déjà que c’était un alibi pour tout jeter. Le recyclage n’est pas la seule façon de transformer les choses. Il s’agit seulement d’une des solutions. » Lavoisier en sait quelque chose, l’émissaire cite alors le grand homme : « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme ». Il suffit seulement de prendre la peine de réfléchir à la meilleure manière de transformer les choses, au cas par cas.

Galeriste, auteur, chef d’entreprise, expert auprès de l’ONU... Est-il capable de se mettre au vert ? « Je me suis fixé un objectif. Quand je ferai le bilan des 10 000 produits que j’ai créés et qui ont été des déchets, et le bilan de toutes les expositions, les bouquins, les industriels qui, grâce à moi, ont réduit de 40% leur émission de CO2, si je pouvais finir avec un bilan carbone neutre, je serais vraiment content. »
Veut-il se racheter une conduite ? A-t-il peur du jugement dernier ? « Je trouve ça bien et juste. Tout simplement. » On le découvre grand optimiste mais pas utopiste. Il montre son fond d’écran d’ordinateur. Le désert à perte de vue, Fabrice Peltier juché sur un quad. « On peut vivre avec son époque et donner à la planète. Une question d’équilibre. On peut continuer à faire la fête mais de manière responsable ! »
L’homme est serein, apaisé : « J’ai vu les choses changer, je sais qu’on va dans le bon sens et qu’il n’est pas trop tard. La Terre a une capacité de survie et de régénérescence incroyable. Seulement, il ne faut pas baisser les bras ! » La planète peut compter dessus, Fabrice Peltier n’a pas encore tout déballé de l’emballage.


Dorothée Duchemin , Citazine, octobre 2010


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Interview

Témoignage d’entreprise : P’Référence



Créée en 1985 par Fabrice Peltier, qui se définit comme « un designer de l’ordure », la société
« P’Référence dynamiseur de marques » exerce deux métiers principaux :
le design graphique et le design volume et innovation. Considérée comme l’une des agences françaises majeures de design packaging, P’référence compte à son actif, la création de plus de
10 000 emballages de produits de grande consommation.

Quels objectifs ont présidé à la naissance de P'Référence ?

Fabrice Peltier :
Je me suis intéressé au packaging par hasard, car c'est un domaine auquel ma formation de graphiste à l'école Estienne ne m'avait pas préparé. Or, dans les années 80, ce sujet a connu un véritable essor, en phase avec celui de la grande distribution et des produits de grande consommation. Ainsi, lorsque je suis sorti de l'école en 1983 et que je me suis lancé avec un statut d'indépendant, une des principales demandes de mes clients était de créer le graphisme de packagings.
Mon activité devenant de plus en plus importante, j'ai décidé de créer P'Référence, une agence spécialisée dans la création des packagings. En 1993, les premiers décrets européens ont commencé à stigmatiser les déchets des emballages. Mon métier est devenu décrié car il représentait le symbole le plus visible du gaspillage de la société de consommation. Par conviction, je me suis lancé dans une réflexion sur l'éco-design, avant que ce mot n'existe. Je pense que les designers ont une responsabilité environnementale, que je m'évertue à leur rappeler. J'ai longtemps été un Don Quichotte vis-à-vis de mes clients et des designers. Au sein de P'Référence, nous essayons de faire en sorte que toutes les fonctions de l'emballage soient optimisées : fonction commerciale (aider le client à mieux vendre), fonctionnalité (aider le consommateur à mieux utiliser le produit), fonction environnementale (proposer un emballage avec un impact minimum sur la planète, facilement recyclable ou valorisable).

Quelles sont les particularités du packaging alimentaire ?

FP :
C'est un véritable paradoxe : on demande tout et son contraire au packaging. Aujourd'hui, des voix s'élèvent contre la boîte de conserve, en oubliant qu'elle a éradiqué le scorbut. Jusqu'à présent, elle a plus servi à sauver des vies qu'à en détruire. Il est vrai que des études sont menées sur les migrations des PET et des vernis, mais l'emballage, quel qu'il soit, conserve mieux la santé qu'il ne l'altère.
Quelles ont été les changements marquants au niveau du packaging ?
Tout d'abord, le poids des emballages a fortement diminué, pour répondre à une directive européenne de 1993, qui prônait la réduction à la source. Les industriels ont accepté d'autant plus facilement de travailler sur la diminution des volumes, qu'ils ont, de cette manière, réduit leurs coûts. D'ailleurs, en 2006, pour la première fois, nous avons remarqué une baisse du tonnage d'emballages mis sur le marché, pour les adhérents d'Eco Emballages. Les résultats sont exceptionnels, mais cet allègement va atteindre ses limites.
En parallèle, le fait le plus marquant de ces trois dernières années, concerne l'arrivée de notions telles que l'empreinte carbone, l'éco-conception et l'éco-design. Cela signifie un changement fondamental des process de travail, y compris au niveau de la logistique.
Ces emballages sur lesquels je travaille depuis 25 ans ont été inventés à la fin du 19e siècle et au début du 20e siècle. Cette industrie, la 7ème mondiale, n'a pas connu de remise en cause fondamentale, ni d'innovation majeure depuis plus de 60 ans. Nous sortons d'une période d'amélioration pour entrer dans une ère d'invention. Nous sommes véritablement dans une révolution des comportements, engendrée par une prise de conscience au niveau de la population.

Quelles sont les pistes pour l'avenir des emballages ?

FP :
Je pense qu'on va se diriger vers des matériaux souples et des nano matériaux. Plus globalement, on travaillera sur un emballage le plus solide et le plus « juste au corps » possible du produit. On ira aussi vers des solutions de remplissage, et d'autres modes de commercialisation, plus tournés vers l'abonnement que l'achat et beaucoup plus « on line », avec moins d'échanges matériels.

Fabrice Peltier, un expert du design packaging responsable.

Formé à l'Ecole Estienne, il débute sa carrière comme graphiste indépendant. Dans les années 90, il commence son combat sur la nécessité de trier et recycler les emballages. Depuis, il multiplie les interventions auprès de ses pairs, pour les sensibiliser à l'importance de minimiser l'impact environnemental des emballages. Directeur de la collection IDPack (éditions Pyramyd), auteur de livres, d'articles et animateur de conférences, Fabrice Peltier participe en 2003, à la création de l'INDP (Institut National du Design Packaging), dont il assure, depuis, la présidence. En 2008, il fonde la Designpack Gallery, le premier espace grand public entièrement dédié au design packaging. Enfin, il est désigné par l'ONUDI (Organisation des Nations Unies pour le Développement Industriel), comme expert design packaging. Son plus grand rêve serait de terminer sa carrière avec un bilan carbone neutre, grâce aux gains qu'auront engendrés ses créations et son engagement.


Lettre technologique, N°10, Septembre 2010


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Emballé c'est signé


Expositions, livres, conseils aux entreprises et bien sûr, créations, Fabrice Peltier prend tous les chemins pour faire évoluer les mentalités et transformer les déchets d'emballages en ½uvres d'art.


Le recyclage, Fabrice Peltier connaît ! En 1985, le designer crée P'Référence, société spécialisée dans la création du design packaging. Il devient ainsi l'un des pionniers dans le domaine : en vingt-deux ans, l'agence aura créé plus de dix mille packagings ! Adepte de l'éco-design dès la première heure, Fabrice s'est attaché à expliquer son métier au travers de plusieurs ouvrages : L'Eau, source d'innovations, La Boîte, solution d'avenir, Écodesign, chemins vertueux, Art, échanges créatifs ainsi que Série limitée, objets de collection aux éditions Pyramyd. Récemment nommé expert pour le design packaging auprès de l'Organisation des Nations Unies  pour le Développement Industriel (ONUDI), il aide aussi les sociétés des pays émergeants à améliorer leurs emballages afin de développe leurs exportations. Et en qualité d'éco-designer, il s'implique aussi après des entreprises dans une démarche de recyclage... artistique. Ainsi, avec le soutien de Coca-Cola Entreprise et la Ville de Paris, Fabrice Peltier a mis en place pour Noël des illuminations de rues. Il a utilisé pour cela des lustres composés de 45 bouteilles plastiques chacun, et fait  pousser des arbres de quatre mètres de haut fabriqués  avec 1 200 bouteilles par pied. L'objectif était bien sûr de sensibiliser l'opinion au recyclage dans une période de consommation particulièrement marquée. Fabrice Peltier a ouvert en 2008, à Paris, la Design Pack Gallery : un espace unique au monde spécialisé dans l'art du design packaging. Il y organise, du 29 mars au 05 juin 2010, l'exposition « 'R' de Recyclage - La seconde vie des emballages », et révèle ainsi au grand public comment ces emballages peuvent servir de matière première à de nombreux artistes. Quand de simples bouteilles deviennent des lustres, des cagettes se transforment en bibliothèques...


Élise MORIN, Neo Planete, Février 2010


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Fabrice Peltier
Fabrice Peltier, l'emballage repensé

La Designpack Gallery est un espace pour la promotion de l'Art du Design Packaging. Il y est présenté des expositions sur tout ce qui gravite autour de l'univers de la création des emballages. Librairie, ventes de produits, d'objets d'arts et de cadeaux ayant pour thème le packaging. Oui, mais pas seulement ! Au premier étage de cet espace, Fabrice Peltier repense sans cesse l'emballage et sa fin de vie afin de limiter son impact environnemental. Sujet qu'il connaît sur le bout des doigts et qu'il défend à l'ONU où il est expert pour le développement du packaging. Sujet qui le taraudait déjà à l'âge de 9 ans alors qu'il remporte un concours de dessin lancé par l'Unesco en 1970 qui prônait la nécessité de l'éducation pour protéger l'environnement. « Dans chaque virage en Lozère où j'habitais, c'était un dépôt d'ordures, donc à 9 ans je faisais partie d'associations de protection de la nature et je vidais le week-end les dépôts d'ordures. »


Quand on lui demande s'il n'est pas opportuniste de surfer sur la vague du développement durable, il répond sereinement que cela fait plus de dix ans qu'il à commencé à plancher sur le sujet, à l'heure où peu se préoccupaient des déchets.


« J'ai échoué dans l'emballage sans vraiment me rendre compte de son impact environnemental. Le geste ultime de la consommation c'était de bien ouvrir un emballage et de bien le fermer, mais aujourd'hui c'est aussi de bien le jeter. »


Recycler est un problème d'éducation. Fabrice Peltier à l'issue de notre entretien s'envole pour Québec faire une conférence dans ce but et secouer les mentalités : « j'ai toujours soulevé une problématique qui est très polémique et non politiquement correcte : le recyclage qui consiste à transformer les emballages en matière première, est-ce la seule, la bonne solution ? ».


Il nous donne un exemple : « recycler a un impact écologique. Aujourd'hui il n'est pas si évident qu'utiliser du papier recyclé soit la bonne solution. L'industrie papetière sert à entretenir les forêts. Ils ne font pas de la coupe franche. Une forêt pour être entretenue doit être coupée. Donc, il est beaucoup plus écologique d'utiliser du papier issu de forêts écogérées que d'utiliser du papier recyclé qui demande de l'énergie et qui pollue énormément. »


La maxime de Lavoisier, Fabrice Peltier la fait sienne : « rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme ». En d'autres termes, faut-il retransformer en matières premières ou en un autre objet ? Et pourquoi ne pas se passer de l'emballage ?


« Il serait impossible de s'en passer. Il faut continuer à faire de l'emballage. Oui, ici il y a de l'eau potable, mais 80% des pays du monde n'en ont pas, il leur faut donc des bouteilles. Plus l'emballage est développé, moins il y a de pertes alimentaires et inversement. Mais il faut se demander : est-ce qu'il n'y a pas une autre forme de recyclage ? C'est ce sur quoi j'essaie de me mobiliser. » Donc Fabrice Peltier découpe l'emballage, son caractère innovant, sociétal, culturel, environnemental, pour arriver à le faire comprendre, avec pour thème fédérateur, le développement durable.


« Je place le respect de l'environnement et la meilleure gestion des déchets d'emballages dans les contraintes marketing qui me sont données pour anticiper et innover. »


« Au c½ur de l'écodesign il y a l'écoconception en amont : rendre les emballages plus écologiques sans altérer leur fonctionnalité, aider les consommateurs à mieux jeter et faciliter la réutilisation de l'emballage en tout ou partie. S'engager sur les chemins vertueux, c'est réduire, éduquer, recycler. »


Les pistes novatrices qui doivent nous amener sur ces chemins, sont la réutilisation de l'emballage. Ils vont nous servir à faire d'autres objets : des lustres, des sacs, des vases, des bijoux et de l'art, autant d'idées que Fabrice Peltier source aux quatre coins du monde, quand il ne les invente pas lui-même pour rendre la fin de vie de l'emballage plus intelligente et plus belle.


« J'aime dire que je fais du design de l'ordure. »



Fanny LASSERRE et Thierry VASSEUR, Sub Yu N°9, Novembre 2009



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Interview

Fabrice Peltier, une vie dédiée au design packaging


À l'occasion des 25 ans de l'agence P'Référence et de la première année de la Designpack Gallery, Emballages Magazine a rencontré leur fondateur, Fabrice Peltier.


Designer, président de l'INDP, galeriste, expert pour l'ONUDI, écrivain...comment réussissez-vous à tout faire ?


Fabrice Peltier : Il est parfois compliqué de gérer plusieurs activités en même temps, mais c'est tellement passionnant ! Et puis, je n'ai pas tout commencé en même temps. J'ai créé l'agence P'Référence il y a bientôt 25 ans puis au hasard des rencontres, j'ai commencé à écrire des articles, notamment pour Emballages Magazine en 2000. Ceci m'a donné envie de commencer une collection de livres dédiés au design packaging en 2006. J'ai décidé de créer l'Institut national du design packaging, (INDP) et la Designpack Gallery pour ½uvrer à la reconnaissance du design packaging, l'un de manière institutionnel, l'autre de façon plus personnelle. L'INDP est maintenant une structure qui fonctionne très bien par elle-même.


La Designpack Gallery vient de souffler sa première bougie. Quel est le bilan de cette première année ?


FP : En un an, la Designpack Gallery a accueilli quelque 18 000 visiteurs - grand public et professionnels-. Nous avons eu que des retours positifs : preuve que la galerie comble un manque. Car, plus qu'une salle d'exposition, la Designpack Gallery est un véritable centre de ressources du design packaging : des cycles de conférences sur ce thème sont organisés ; la petite librairie, ne regroupant que des ouvrages consacrés à différents aspects du design packaging, vend une centaine de livres par mois. Je suis vraiment ravi de ce résultat. La Designpack Gallery est ma « danseuse ». Pendant 25 ans, j'ai fait de la création pour des clients. Ici, je fais ce que je veux, je choisis les artistes et les objets dont j'ai envie.


Au printemps, vous avez commencé une autre activité pour la promotion du design packaging : expert auprès de l'ONUDI. En quoi consiste votre mission ?


FP : L'ONUDI (Organisation des Nations Unies pour le développement industriel) a fait appel à moi afin d'assister techniquement des industriels et des designers libanais. Le but est de les aider à se mettre à niveau sur tous les aspects du design des emballages, afin de développer leurs exportations. Je donne également des conférences et je participe à un programme de formation sur les bonnes pratiques en matière d'innovation et de développement durable appliquées au secteur de l'emballage ;


L'éco-conception est une voie que P'Référence explore depuis quelques années déjà. Qu'apporte une agence de design dans ce domaine ?


FP : P'Référence a acquis une vraie légitimité en ce qui concerne l'éco-conception. Nous aidons nos clients sur l'éco-design des packs, mais également sur la manière de communiquer leur éco-engagement.Ils sont encore dans le flou, nous essayons de les aiguiller sans qu'ils tombent dans le greenwashing.


Quels sont vos prochains projets ?


FP : En fin d'année, nous préparons un événement : la Designpack Gallery pour fêter les 25 ans de P'Référence. Ensuite les Pentawards 2009 seront exposés en début d'année 2010.Je travaille actuellement sur un nouveau livre et sur le programme des prochaines expositions. Côté agence, j'espère que 2010 sera une meilleure année que 2009. En effet P'Référence ne fait pas exception et souffre comme toute la profession. Nous avons toutefois de beaux projets pour l'année prochaine. Pour l'instant, je ne vous en dirai pas plus.


Entretien : Mirabelle Belloir, EMBALLAGES MAGAZINE n°919, octobre 2009



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Prêcher la bonne parole


Patron et fondateur de l'agence P'Référence, Fabrice Peltier (48 ans), a créé en l'espace de vingt-cinq ans plus de 10 000 emballages. Récemment il a lancé à Paris - au 24 rue de Richelieu, entre les Musées du Louvre, des Arts Décoratifs et la Bibliothèque Nationale-, la Designpack Gallery, en plein c½ur de Paris. Il est également un ardent défenseur du packaging vert. Auteur prolifique, il a écrit notamment sur l'emballage et l'environnement. ... Il est aussi depuis peu expert Design Packaging pour l'ONUDI, Organisation des Nations Unies pour le Développement Industriel. La Designpack Gallery, un espace exclusivement dédié à l'art du design packaging se niche dans la rue Richelieu, au c½ur d'un quartier magique de Paris. Un espace où l'on peut admirer des expositions sur tout sur tout ce qui gravite autour de l'univers de la création des emballages, assister à des conférences et des événements, pour le grand public et les professionnels. Son espace équipé de matériel audiovisuel permet d'accueillir jusqu'à 50 personnes assises. Sont aussi installés sur le lieu une librairie spécialisée sur le design packaging et un espace de ventes de vente de produits conditionnés dans des emballages d'exception, d'objets d'art et de cadeaux ayant pour thème, le packaging.
« J'ai toujours rêvé d'avoir ma propre galerie d'art, c'est fait. Je voulais aussi regrouper toutes mes activités, mon agence, faire mes conférences chez moi , et exposer. Je me suis rendu compte qu'il y avait vraiment un besoin de connaître le design packaging. Je me suis rendu compte que les marques ne connaissaient même pas leur propre histoire. Simplement parce que cette mémoire se perd au fil des différents rachats par des groupes financiers. Je crois que la création passe avant tout par un respect du passé, une compréhension de ce qui s'est fait avant. Comment créer sans savoir d'où l'on vient. Pour inventer, il faut comprendre ».


Défenseur de l'emballage vert


Hyperactif, Fabrice Peltier, s'est vu confier récemment une nouvelle mission. Et quelle mission ! L'organisation des Nations Unis pour le Développement Industriel (ONUDI) a en effet fait appel à lui comme expert pour le Design Packaging. Sa première mission a eu lieu au Liban tout récemment. Il offre une assistance technique auprès des industriels et des designers Libanais pour les aider à se mettre à niveau sur tous les aspects du design des emballages afin de développer leurs exportations. Par ailleurs, il donne des conférences dans les Universités d'Art et assure un programme de formation sur les bonnes pratiques en matière d'innovation et de Développement Durable appliqué au secteur de l'emballage.
« Cela montre qu'à haut niveau, il y a une prise de conscience de ce que notre métier peut apporter. Et il s'agit de ma mission la plus facile et la plus agréable. Je fais des conférences pour des gens qui ont un réel besoin et qui ont un respect de la personne qui vient répondre à leurs besoins . C'est un vrai bonheur que d'aller au Liban, dans les écoles d'art et de marketing, de parler devant des salles combles avec des gens qui écoutent, qui ont envie ».


Ma mission est simple. Lorsqu'un pays en voie de développement veut à la fois développer le commerce dans le pays et exporter ses produits, ils n'a pas d'autre choix que de faire du packaging. L'emballage est un facteur de développement économique. Il y a aussi toute la partie technique, l'aspect législatif, les normes à respecter. En Europe on légifère dans tous les sens : sur l'éco-confection, l'écologie, les ingrédients. C'est perçu par nos voisins qui veulent exporter comme du protectionnisme, un parcours d'obstacles. Ce qu'on attend de moi, c'est d'aider à franchir ces obstacles. L'ONU m'a contacté pour aller expliquer tout cela un peu partout. Je crois être le premier à assurer ce type de mission.


J'ai deux grosses missions : aider à faire du design et éduquer en matière d'écologie, de développement durable. Cela revient à changer l'idée de l'emballage, à faire en sorte que cela ne soit plus considéré comme un déchet.


Jean-Michel Stichelbaut, PUB, octobre 2009

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Fabrice Peltier, Président de P'Référence - Dynamiseur de marques Interview de Fabrice Peltier
par Irène Lopez

Vous avez fondé P'REFERENCE en 1985. Dans quelles circonstances ?
Fabrice Peltier :
Après avoir étudié les arts graphiques au lycée Jean Bart à Grenoble, je suis "monté" à Paris au début des années quatre-vingt, continuer mes études au sein de l'école Estienne. Les professeurs n'avaient de cesse de nous répéter "soyez autonomes". J'ai alors pris la consigne au premier degré. J'ai donc commencé à démarcher des clients et à chercher des projets à réaliser. Tant et si bien qu'à la fin de ma scolarité, je ne répondais plus aux problématiques proposées par les enseignants, mais aux briefs de mes clients !
En 1985, l'affluence de travail à laquelle j'étais confronté m'a permis de créer l'agence. Né d'une mère institutrice et d'un père fonctionnaire, avec une formation artistique, je n'étais pas familier de la gestion d'une entreprise.

Quelles ambitions aviez-vous pour l'agence, au début ?
FP :
C'est assez simple. Entre 1985 et 1998, j'étais obsédé par la croissance de l'agence. Nous étions arrivés à une taille de plus de cinquante personnes. P'REFERENCE faisait partie des cinq premières agences (en terme de taille) d'après un classement du magazine Stratégie.
Aujourd'hui, je n'ai plus cette philosophie. Je me suis ouvert à pleins d'autres choses. Je choisis mes clients. Je n'ai plus ce désir de croissance. Je ne recherche pas des briefs. Je veux travailler sur des projets intéressants, en me faisant plaisir avant tout.

À quoi est dû ce changement ?
FP :
En 1998, un accident sur le Rallye de Tunisie me cloue sur une chaise roulante. J'ai passé de longs mois de rééducation avant de pouvoir marcher. J'ai beaucoup réfléchi. Et c'est à partir de ce moment que j'ai eu la volonté de sortir mes propres produits et de communiquer.
J'ai ainsi commencé à écrire des articles dans les revues professionnelles. Ensuite, j'ai été la principale source d'informations de l'ouvrage L'impact du pack (aux éditions Pyramyd). Puis je suis devenu directeur de la collection ID Pack. L'année dernière, j'ai publié L'eau source d'innovations et La boîte solution d'avenir. Je prépare en ce moment L'art et le packaging et L'éco conception, deux ouvrages réalisés, à l'instar des deux premiers, pour faire découvrir de manière graphique et didactique les aspects les plus surprenants de l'univers du packaging.

Comment fonctionne l'agence aujourd'hui ?
FP :
Nous sommes vingt-cinq personnes. Quatre grands pôles structurent l'agence : communication, identité, espace et volume. Nous offrons à nos clients un grande valeur ajoutée créative et un accompagnement dans la durée, pour que leurs projets voient le jour dans les meilleures conditions. Nous avons dégagé en 2006 une marge brute de 3,5 millions d'euros.

Il n'y a pas de commercial dans votre équipe. Pouvez-vous expliquer ce choix ?
FP :
C'est vrai. P'REFERENCE doit bien être l'une des seules agences qui fonctionne comme ça. Nous n'avons pas une démarche commerciale classique. Nous avons un savoir-faire et nous le faisons savoir via des mailings. Aussi incroyable que cela puisse paraître, les clients appellent.

Une entreprise aussi florissante (3,5 millions d'euros de marge brute en 2006) doit attirer les capitaux. Avez-vous déjà eu des propositions d'achat ?
FP :
Oui, à plusieurs reprises. De grands groupes de publicité m'ont fait des propositions pour acheter l'agence. Mais je pense que le mariage du design et de la publicité n'est pas bon. Il repose sur un postulat erroné, selon lequel le design serait au service de la stratégie de communication. Or, c'est faux : le design est au service du produit.
Le seul mariage qui serait judicieux serait de s'allier avec un fabricant d'emballage. Ce dernier doit apporter des solutions d'emballage, de véritables innovations. Intégrer le design chez le fabricant serait le faire rentrer dans l'industrie. Vous voyez, je ne suis pas réfractaire à toute alliance. Encore faut-il qu'elle soit judicieuse.

Sur le site internet de l'agence, vous avez mis en vente vos propres produits. À quelles fins ?
FP :
Chaque année, nous créons un produit événementiel. Ce rendez-vous est l'occasion de démontrer notre créativité et notre savoir-faire. Ces réalisations ont toutes un point commun : elles utilisent l'emballage comme support pour communiquer sur un fait marquant de l'actualité. En 2000, nous avions créé "Le Dernier Bol d'Air du XXème siècle" : de l'air de l'ancien millénaire avait été saisi dans un bol totalement hermétique pour permettre aux générations futures de respirer une bouffée d'une autre ère. Ont suivi, en 2001 "L'eau du thé & l'eau du café", en 2002 "L'adieu au franc", en 2003 "Esprit d'enfant", en 2004 "Sécuriteuf", en 2005 "My Sleeve" et en 2006 "La nouvelle sophistication". Le but est de transformer le packaging pour dire quelque chose de plus que ce qu'il contient. Nous avons imaginé et créé des "collectors" pour vendre des idées et non un produit. Leur succès commercial a été la cerise sur le gâteau.

Certains de ces produits, tout comme les "collectors" que vous avez créés sont inventoriés au Musée de la Publicité à Paris et décrits comme des ½uvres contemporaines de qualité. Quel sentiment cela vous inspire ?
FP :
D'habitude, on reçoit ce type de distinction lorsqu'on est mort ! Plus sérieusement, c'est honorifique. Cela fait du bien à l'égo.


E&P : Aujourd'hui, un emballage peut-il encore vous séduire ? Si oui, y en a t'il un que vous préférez aux autres ?
FP :
Je ne suis pas encore frustré, mais je pourrais l'être car il n'y a pas assez de véritables innovations. Quand à mon packaging préféré, je ne peux pas vous répondre car j'aime le pack dans sa globalité. Mes choix vont donc être créatifs. Je n'ai pas de matériau ni de technique préférés. Et pour conclure, comme l'ont déjà dit d'autres créatifs avant moi : ma meilleure création, je ne l'ai pas encore créée...



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Fabrice Peltier, Auteur de l'Impact du Pack

Fabrice Peltier, Dynamiseur
Extrait du livre "L'Impact du Pack"

Portrait par Pascale Nivelle, journaliste à Libération


Est-ce d'avoir grandi avec un frère jumeau ? "Je ne fais rien à moitié", annonce Fabrice Peltier. Une montagne, il a envie de l'escalader. Un projet, il va jusqu'au bout. Sachant qu'après, il y a un autre sommet, un autre projet, toujours plus inaccessible. "Créatif ou grimpeur, c'est la même chose, dit-il. On part toujours d'en bas." Bas, haut, comme sur les cartons de déménageur. Le président de P'Référence, agence de design packaging, aime les slogans qui claquent.


Design packaging ? Dites plutôt "Dynamiseur de Marques", l'enseigne de la maison Peltier depuis 1985 à Paris. Dynamiser, c'est donc conditionner sur mesure. L'eau, par exemple, qu'il aime tant capturer entre ses paumes en montagne. Elle existe en biberons, en litres prêts à porter pour madame, en gourdes pour sportifs, en jerricans format familial...Qu'importe le flacon direz-vous, cette eau coule de source. C'est sa fonction qui a changé : "Les gens n'achètent plus un produit, mais une utilisation, s'emballe Fabrice Peltier, c'est le début de l'âge d'or !" Au siècle dernier, en 1999, il a inventé l'air en bol ou la vente du vent. Un jour d'étiage à Airparif, il a fait capsuler des milliers de canettes de luxe, pleines de l'atmosphère du dix-septième arrondissement, avec emballage doré et cachet de cire d'huissier : "Imaginez l'enfant des années 2000. À cinquante ans, il pourra respirer un bol d'air du vingtième siècle." On sourit, Fabrice Peltier est un rêveur. Il a fêté ses quarante-trois ans dans les dunes du Sahara, seul devant son 4x4, comme Saint-Exupéry et son Simoun. Pour savourer l'instant, il débouche un premier grand cru classé Saint-Émilion 1961. Bouteille de verre, 75 cl, bouchon de liège et étiquette or fin. Du classique. Il dit : "Moi, je suis un consommateur très basique. J'achète peu. Et toujours les mêmes marques."

Les grands espaces, la nature sauvage, la randonnée, il en rêve neuf mois sur douze et s'y évade le reste du temps. À vélo, en quad, à moto, il oublie Paris et les linéaires. En 1998, un accident de rallye le cloue sur une chaise roulante, avec la terreur de ne jamais remarcher et des mois de rééducation menée comme un sportif : "Mon truc, c'est l'endurance. Et la liberté." Fabrice Peltier par sa seule volonté se donne la force de braver le destin. Son bureau ouvert à tout vent, est une caisse de résonance où chacun peut s'exprimer. Fabrice aime parler d'alignement des planètes, un succès se construit point par point en regardant vers le ciel. Tout doit suivre la même trajectoire. "C'est pour cela que nous travaillons en équipe que ce soit à l'agence ou avec nos clients." Fabrice, dont l'agence compte une vingtaine de salariés et court parmi le peloton de tête français du design packaging, n'a pas l'allure du classique business man. Il porte un jean, un t-shirt et des baskets, le tout sans logo. Il passe sa vie dans les supermarchés, Caddie vide mais tête pleine : "Je connais tous les produits c'est mon boulot . Je me mets à la place de tous les consommateurs, vieux, enfants, animaux... Quand je sens que quelque chose manque ou fonctionne mal, je l'imagine."  Il a relooké des classiques, le pain Harry's façon US, le thé de Sir Thomas Lipton ou la gamme de sirops Teisseire. Il veut maintenant inventer des objets. Son Bol d'air, L'Eau du Café, L'Eau du Thé, ou le Sécuriteuf , un kit du "teufeur" avec préservatifs et éthylotest...

La compétition, Fabrice Peltier connaît. Dès le départ, ils étaient deux. Frédéric, son jumeau et lui. Classés nationaux en ski, fous de vélo, les frères Peltier se battaient pour la première place sur les podiums et la dernière à l'école. Leur père, ingénieur des eaux et forêts, et leur mère institutrice en maternelle, se lamentaient d'avoir deux cancres sur quatre enfants. "On ne fichait rien, on a eu le BEPC à l'oral de rattrapage", raconte Fabrice. Ils ont vécu en pleine nature, du côté de Mende en Lozère, puis à Clermont-Ferrand et ensuite à Grenoble. Ils glissaient et se saoulaient de grand air, rêvant de devenir guide de haute montagne ou moniteur de ski. "Mais nous étions tellement mauvais à l'école que l'on nous a refusés en sport études !" Ce sera donc le lycée technique pour Fabrice (Frédéric, bien plus tard est devenu avocat d'affaires). Il choisit les métiers de l'imprimerie, un peu au hasard. Plomb, photogravure, bas-de-casse, vélin... Le monde du papier lui plaît, au point de renoncer au ski de haut niveau. À dix-sept ans, il part faire le tour de Corse, en solitaire et à mobylette, en revient avec une plaquette illustrée et joliment designée. J'ai vu en Corse, son premier objet. À la rentrée, on lui conseille de poursuivre ses études à l'école Estienne (arts graphiques et publicité) à condition d'être le meilleur. Il s'y prépare comme un athlète.

Objectif Paris, se dit ce jusqu'au-boutiste. Pari gagné, il brûle les étapes : "Dès la deuxième année d'école, j'avais des clients et je ne demandais plus rien à mes parents." Fabrice emprunte trois sous à sa grand-mère et fonde P'Référence à 24 ans. L'agence connaîtra une croissance à deux chiffres dans les années qui suivent. Ses premiers contrats passent dans sa collection d'objets autour de Tintin. Salles des ventes, brocantes, boutiques, Fabrice Peltier rafle tous les objets du petit reporter et détient aujourd'hui une des plus importantes collections au monde. Depuis qu'il possède tout ce qui s'est fabriqué, il invente les pièces de ses rêves. "J'ai près de 4 000 pièces, que j'ai fait faire dans le monde entier. Son agence un grand loft, du côté de la Place Clichy, est organisé autour de sa passion. Tintin est partout. En lithos, en plaques émail, en maquettes, en bustes, en miniatures précieusement exposées dans des vitrines. Dans son bureau presque vide trône la plus belle pièce : une maquette en coupe de la fusée rouge, usinée sur commande. "On vit dans son rêve", lance un collaborateur perché sur un tabouret, entre le dernier Macintosh et la Castafiore. À vingt-quatre ans, avec le coffret de stylos feutre, des créatifs de l'époque, Fabrice Peltier a fondé cette agence qu'il ne vendrait pas pour tous les bijoux du monde. "Mon moteur n'est pas l'argent, mais de réaliser mes objectifs. Le premier était d'être libre et indépendant. Aujourd'hui, c'est de pérenniser vingt ans d'expérience et de transmettre à ceux qui prendront la relève." Réfléchir plutôt que foncer. Moins courir pour mieux marcher. Et surtout transmettre ses passions.

Son premier logo créé à l'école Estienne, les empreintes rouges de son chat l'ont suivi longtemps. Il en reste le rouge, couleur de l'énergie et symbole de P'Référence. Il y a aussi désormais sa signature, qu'il sème dans les colonnes de Marketing Magazine et d'Emballage Magazine. Des lingettes au développement durable, Fabrice Peltier ausculte maux et tendances du packaging. Il prône "le design de l'ordure" mais confie aussi ses "déchirements", face à cet art éphémère et de mauvaise réputation écologique. "Le packaging est démocratique, c'est grâce à lui que tout le monde a pu manger des recettes exotiques ou boire de l'eau minérale. Et regardez tout ce qu'on fait d'une bouteille de plastique dans le tiers-monde !" L'apôtre de l'emballage, "filière industrialisée la mieux organisée du monde sur le plan du recyclage", peut prêcher des heures sur son art qu'il transmet lors de formations professionnelles ou conférences. Croyant mais pas aveugle : "Si le monde entier se met à consommer le quart des pays occidentaux, on est mort." Comme n'importe qui, la vue d'un sac plastique égaré sur une dune le navre. Mais il n'y a que lui pour avoir la gorge serrée en marchant sur un vieux ticket de la Française des Jeux abandonné sur un trottoir : "Je pense au créatif qui s'est arraché pendant des heures."

Fabrice Peltier Fabrice Peltier
Fondateur de
la Designpack Gallery

"J'ai rêvé des années d'un lieu dédié au design packaging, et je l'ai fait, ici, avec la Designpack Gallery."